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Le journal d'Ukraine
7 mars 2006

Affaire Gogadze

Procès Gongadze - Rappel des faits

Géorgiy Gongadze, journaliste politique, réalisait des articles sur des affaires de corruption impliquant des personnalités politiques du gouvernement Koutchma et militait activement pour une meilleure liberté de la presse dans son pays. Il avait créé, en avril 2000, Ukrainskaïa Pravda, un journal en ligne, dont il était également rédacteur en chef.

Il est kidnappé dans la soirée du 16 septembre 2000, à l’âge de 31 ans. Le 2 novembre 2000, un corps décapité et un crâne sont retrouvés dans une forêt de la région de Taraschanskyi, près de Kiev. L’affaire prend la dimension d’une affaire d’Etat quelques semaines après la découverte du corps, avec la révélation, par l’un des chefs de l’opposition, d’enregistrements où le président Léonid Koutchma demanderait à son ministre de l’Intérieur de se débarrasser du journaliste. Une délégation de Reporters sans frontières se rend alors à Kiev entre le 5 et le 12 janvier 2001 et constate une accumulation de fautes graves commises par les autorités judiciaires ukrainiennes tout au long de l’enquête. L‘instruction semble avoir été menée avec le souci premier de protéger l’exécutif des graves accusations dont il était l’objet, plutôt que de rechercher la vérité. Durant les mois qui suivent, les autorités feront preuve de mépris vis-à-vis des proches de la victime et montreront leur impatience d’enterrer cette affaire. Une nouvelle expertise des enregistrements est effectuée sur ordre du parquet durant l’été 2002 pour identifier les voix, ainsi qu’une nouvelle analyse des restes du corps « avec la participation de spécialistes des pays membres du Conseil de l’Europe ».

Pour le deuxième anniversaire de la disparition de Géorgiy Gongadze, en septembre 2002, Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières, se rend de nouveau à Kiev et signe les documents pour devenir officiellement mandataire des parties civiles, Lessia et Miroslava Gongadze, statut qui leur a toujours été refusé jusqu’alors. Après de nombreuses expertises et contre-expertises, et une volonté affirmée des autorités de retarder l’identification du corps, une nouvelle analyse ADN est menée à l’institut médico-légal de Lausanne (Suisse) en janvier 2003, sur demande de Robert Ménard. Celle-ci révèle, en mars, que la probabilité de maternité de Lessia Gongadze envers les restes humains trouvés à Tarachtcha est supérieure à 99,991%. Lessia Gongadze accepte alors d’inhumer le corps de son fils, ce qu’elle refusait de faire depuis 27 mois.

L’affaire Gongadze étant plus que jamais un enjeu politique majeur, de nouvelles informations sont révélées par la presse et la justice durant l’été 2004, à l’approche de l’élection présidentielle. Le 17 juin, la commission parlementaire sur l’assassinat de Géorgiy Gongadze, dominée par l’opposition, demande au parquet général d’ouvrir une procédure criminelle contre le président Koutchma et réclame sa destitution. Deux jours plus tard, le quotidien britannique The Independent affirme avoir obtenu de la part des collaborateurs du parquet des documents indiquant que l’ancien premier ministre de l’Intérieur, Iouri Kravtchenko, aurait ordonné à l’ancien chef du renseignement du ministère de l’Intérieur, Olexi Poukatch, de faire suivre Géorgiy Gongadze.

Viktor Iouchtchenko succède à Léonid Koutchma au poste de Président le 23 janvier 2005. A la suite de son empoisonnement, il avait déclaré : « J’espère que nous trouverons le meurtrier de ce journaliste, même si nous connaissons déjà la réponse : ce sont les autorités ». Le 1er mars 2005, le nouveau Président annonce que les meurtriers de Géorgiy Gongadze sont arrêtés et que l’affaire est élucidée, sans livrer leur identité. Deux individus directement impliqués dans le meurtre ont été arrêtés, une troisième personne a reçu l’ordre de ne pas quitter Kiev et le général Olexi Poukatch est recherché. Les deux colonels ukrainiens arrêtés le 1er mars déclarent à la justice, le 14 avril, que le général Olexi Poukatch aurait lui-même étranglé le journaliste. Ce dernier est sous le coup d’un mandat d’arrêt depuis le 24 janvier 2005 et se cacherait en Israël ou en Russie. L’identité des trois meurtriers présumés est révélée au public le 8 août par les procureurs ukrainiens. Il s’agit de trois officiers de police, Valeriy Kostenko, Mikola Protasov et Oleksandr Popovych, accusés d’avoir enlevé et tué Géorgiy Gongadze.

Cinq ans après la disparition de Géorgiy Gongadze, l’enquête révèle donc enfin l’identité des exécutants de l’assassinat du journaliste. Le parquet n’a cependant toujours pas livré les noms des commanditaires, contrairement aux promesses répétées du président Iouchtchenko. Le 20 septembre 2005, une commission d’enquête parlementaire ukrainienne, présidée par Grigoriy Omeltchenko, accuse l’ancien président Koutchma d’être à l’origine de l’enlèvement et de l’assassinat de Géorgiy Gongadze. Elle accuse également le président du Parlement, Volodymyr Litvine, alors chef de l’administration présidentielle, d’être l’instigateur de cet assassinat. Le 8 novembre, la Cour européenne des droits de l’homme condamne les autorités ukrainiennes pour leur incapacité à mener l’enquête et garantir un recours à famille de la victime. Le 9 janvier 2006, le procès des trois policiers accusés d’avoir exécuté Géorgiy Gongadze s’ouvre.Les responsables de ce crime ne seront probablement jamais connus : l’affaire Gongadze est un cas d’impunité.

Source: http://www.rsf.org

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